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L’évolution des méthodologies d’enseignement des langues – et pourquoi elles comptent

Parents, savez-vous quelle méthode pédagogique les professeurs de langue de vos enfants utilisent ?

Elles ont considérablement évolué au cours du temps, répondent à des objectifs très différents et obtiennent des résultats inégaux.

Il y a bien des années, un professeur de russe évoquait l’un de ses anciens condisciples les mieux notés : étudiant français apprenant le russe, connaissant à la perfection toutes les règles de grammaire et doté d’une maîtrise lexicale inégalée. Il n’avait qu’un tout petit problème – qui du reste ne l’avait jamais affecté dans son parcours : il était totalement incapable d’avoir la moindre conversation en russe.

Notre malheureux étudiant était tout simplement victime du système pédagogique le plus traditionnel qui soit pour la didactique des langues étrangères : la méthode grammaire, thème, version. Dans cette approche, l’accent est mis sur la connaissance formelle de la langue, et plus précisément de sa grammaire.

L’apprentissage est déductif : le professeur, maître absolu dans sa classe, expose les règles de grammaire et soumet aux élèves des exercices pour les pratiquer. Le thème et la version font partie des activités les plus prisées. L’enseignement de la langue ne vise aucunement à en faire un outil de communication. Il s’apparente plutôt à la didactique des langues mortes ou liturgiques, comme le grec ancien et le latin, ou dans une moindre mesure le sanskrit. Cette approche, prédominante dans l’Europe du 19ᵉ siècle, violemment critiquée par la suite, n’existe plus que de manière très isolée.


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Au milieu du 20ᵉ siècle, les travaux théoriques des behavioristes engendrent l’apparition aux États-Unis de la méthode audio-orale. Fortement portée sur l’aspect oral, elle se propose d’enseigner la langue par des répétitions et des exercices.

Une variante, développée chez les Britanniques, est la méthode PPP : Présentation (d’une notion), Pratique (avec des exercices), et Production (par l’élève). Les phrases données par le professeur sont répétées mot à mot de nombreuses fois et apprises par cœur, pour favoriser les automatismes. Les exercices consistent typiquement à reprendre ces phrases avec des variantes, par exemple en substituant un mot.

La méthode audio-orale tombe rapidement sous le feu des critiques et se retrouve largement discréditée depuis les années 70. Comme le fait remarquer Harmer (2001), “la méthode audio-orale semble interdire tout traitement linguistique qui aiderait les étudiants à clarifier dans leur propre esprit les nouveaux éléments de la langue ». Elle n’en survit pas moins dans de nombreuses régions du monde.

Dans le monde chinois, par exemple, l’apprentissage par cœur et la répétition sont encore de mise au détriment de la communication. Shumei Zhang (2009) rappelle que la communication orale des Chinois apprenant l’anglais reste extrêmement problématique, « même lorsqu’ils peuvent lire Shakespeare dans le texte après de nombreuses années d’étude ». Les Chinois savent aussi en rire.

Une blague raconte qu’une petite fille apprenant l’anglais tombe un jour dans un fossé alors qu’elle fait du vélo, et se retrouve coincée. Un Américain passe qui lui demande : « Bonjour, ça va ? ». La petite fille déclare mécaniquement « Oui, je vais bien, merci, et vous ? ». L’américain perplexe répond qu’il va bien aussi et s’éloigne.

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Cours de mandarin à l’Institut Confucius de Betong (crédit Hanban)

En réaction à la méthode audio-orale, les années 1970 voient l’apparition des méthodes communicatives d’enseignement linguistique, où la communication est non seulement l’objectif, mais également le moyen d’apprentissage.

Le nouveau paradigme pédagogique recourt à des apprentissages implicites dans des contextes authentiques, et non pas à un apprentissage explicite dans un contexte artificiel. On n’enseigne plus la grammaire, on ne répète plus de phrases construites. L’apprentissage a lieu lors d’événements de communication comme par exemples des conversations. Définie de manière très souple, sans réelle assise théorique, les méthodes communicatives donnent le jour à de nombreuses formes dérivées.

La méthode de langue communicative de première génération a, elle aussi, reçu son lot de critiques.

Son efficacité, tout d’abord, est remise en question. Dornyei (2011) nous rappelle que les enseignements purement implicites de langue étrangère, et même l’immersion, n’ont pas réellement été à la hauteur des espérances. Des obstacles culturels sont également apparus : dans le monde confucéen par exemple, retirer au professeur son rôle central pour en faire un simple facilitateur passe mal. Enfin, la méthode communicative ne répond pas au besoin tel qu’il est encore formulé dans de nombreux pays : réussir à des examens eux-mêmes basés sur la grammaire et le vocabulaire.

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La méthode d’enseignement communicative subit, elle aussi, d’importantes évolutions.

Dans l’un de ses développements les plus intéressants, Dornyei se fait l’avocat de la Principled Communicative Approach dont nous reparlerons – elle combine de manière structurée les enseignements implicites et explicites pour parvenir à une compétence communicative en même temps qu’une correction linguistique.

Il n’y a pas de méthode qui soit systématiquement la meilleure.

La bonne méthode est celle qui permet d’atteindre les objectifs de l’apprenant, et dont la mise en œuvre est possible dans le contexte de l’apprenant.

De toute façon, comme le fait remarquer Canagarajah (1999), la méthode effectivement utilisée en cours est souvent hybride, ressemblant rarement à ce qui est prescrit dans les manuels.

Pour en savoir plus :

–          Dörnyei, Z. (2013). Communicative Language Teaching in the twenty-first century: The ‘Principled Communicative Approach’. In J. Arnold & T. Murphey (Eds.), Meaningful action: Earl Stevick’s influence on language teaching (pp. 161-171). Cambridge: Cambridge University Press.

–          Shumei Zhang (2009). The Role of Input, Interaction and Output in the Development of Oral Fluency. English Language Teaching. December 2009

–          Richard Badger, XiaoBao Yan (2009). To what extent is communicative language teaching a feature of IELTS classes in China. IELTS

–          Jack C. Richards (2006). Communicative Language Teaching today. Cambridge University Press

–          Jeremy Harmer (2001), The Practice of English Language Teaching.Essex: Pearson Education Ltd.

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