Se découvrir soi-même
Souvent, il est une langue qui joue un rôle particulier dans l’histoire familiale. Cette langue est celle du terroir, des ancêtres, des origines, de la culture ou de la religion, ou encore de la belle-famille. Sans-doute, reconnaîtrez-vous ce petit enfant dont la famille a immigré il y a une génération. Il ne peut communiquer, faute de langue commune, avec ses grands-parents restés au pays. Avec l’âge, il se pose de plus en plus de questions. En apprenant la langue de ses parents, il découvrira aussi la culture et le pays de ses ancêtres, et comprendra mieux ses origines.
… Et découvrir l’Autre
Vous êtes dans une grande ville ou un petit village, dans le désert ou la jungle, dans un bureau ou sur la plage, à l’étranger ou dans votre pays. Lorsqu’il vous voit faire l’effort de s’adresser à lui dans sa propre langue qui n’est pas la vôtre, l’Autre détourne son regard vers vous, l’y fixe et esquisse un sourire. Que votre accent soit presque indiscernable ou plus marqué, que votre grammaire, soit parfaite ou perfectible, l’Autre est touché par le respect que vous lui témoignez. Il se détend, s’ouvre, s’apprête à partager des pensées plus intimes maintenant qu’a sauté un filtre psychologique. La connaissance de la langue de l’Autre vous est une porte d’entrée précieuse.
Voyager occasionnellement
Que ce soit pour des vacances, une escale, une mission professionnelle, la connaissance de la langue locale peut changer complètement la physionomie du séjour. Alors que vous ne parliez pas la langue locale, avez-vous déjà été prisonnier de l’emprise exclusive d’un guide qui monopolise les échanges avec le monde extérieur ? Avez-vous vu des étrangers se faire une idée absolument fausse du pays traversé parce qu’ils ne pouvaient communiquer ? À l’inverse, la langue locale n’a-t-elle pas déjà facilité vos contacts, prévus ou impromptus, avec les locaux ? Elle vous permettra parfois de trouver votre chemin, manger le soir, voire récupérer votre passeport ou passer la douane.
… ou faire le grand saut
De 1990 à 2010, environ 160 millions de migrants ont quitté leur pays vers d’autres cieux.
En faites-vous partie ?
Quelle qu’en soit la raison, c’est un changement de vie. La maîtrise de la langue est un élément indispensable à l’intégration sociale et économique. Dans certains pays, l’obtention d’un visa – et à plus forte raison de la nationalité – est conditionnée à un niveau minimal en langue du pays d’accueil. Les parents peinent de temps en temps et la connaissance préalable de la langue est un avantage décisif ; les enfants s’adaptent beaucoup plus rapidement et dépassent vite leurs parents.
Réussir sa vie professionnelle
Avec la globalisation croissante, rares sont les professions et les postes ne demandant plus de compétences dans au moins une, voire deux ou trois langues étrangères.
L’anglais est la lingua franca incontestée de la science
En entreprise, l’un des entretiens d’embauche pourra se tenir dans une langue autre que la sienne. Les connaissances linguistiques permettront au candidat, s’il met en avant au juste moment sa connaissance du japonais, de l’espagnol ou du bahasa, de se différencier parmi de multiples candidats au CV comparable. Quant aux employés en poste, certains voient leur évolution bloquée par leurs limitations à la communication internationale.
… et commencer par réussir ses études
Le rôle des langues à l’école s’accroît avec l’importance des langues dans la vie. À Singapour, par exemple, les élèves passent à la fin de l’école primaire l’un des deux examens les plus importants de leur vie ; la moitié des épreuves porte sur deux langues, l’anglais et leur langue maternelle. Ailleurs dans le monde, la performance en langues déterminera l’entrée au lycée, comptera pour beaucoup dans l’obtention du baccalauréat ou donnera un avantage important dans un dossier pour l’université.
Vivre mieux, plus longtemps
La pratique des langues partage certains mécanismes cérébraux avec ceux impliqués dans les maladies neurologiques du grand âge. Il a ainsi été observé que la maladie d’Alzheimer se déclenche en moyenne cinq ans plus tard chez les bilingues que chez les monolingues. Faites votre gymnastique linguistique et vivez mieux !
… et augmenter ses capacités cognitives
Connaître plusieurs langues, c’est avoir la faculté de passer de l’une à l’autre en se concentrant sur la langue utilisée et en « inhibant » simultanément les autres. Les multilingues utilisent cette faculté dans tous les domaines, même non linguistiques. Ils possèdent ainsi une plus grande flexibilité intellectuelle, une meilleure capacité à gérer l’ambiguïté ou la contradiction apparente, et peuvent jongler avec l’information en ignorant les signaux inutiles ou parasites.
S’émerveiller des autres langues
Peut-être ferez-vous partie de ces passionnés pour lesquels la découverte de chaque langue est un sujet d’émerveillement jubilatoire. Cette nouvelle langue, quels sons a-t-elle produits ? Quel génie va-t-elle déployer pour exprimer telle ou telle notion ? Sera-t-elle isolante, à déclinaison, ou agglutinante ? Comment traitera-t-elle le complément de nom, par exemple, où tantôt le déterminant, tantôt le déterminé se voient modifiés, parfois les deux, parfois encore aucun ; recourra-t-elle à une préposition ou s’en passera-t-elle élégamment ? Pourquoi ce billet compte-t-il 1001 mots en français (soit 5340 lettres), 963 en anglais (soit 4885 lettres), et 2174 caractères en chinois ?
… et mieux comprendre sa propre langue
La langue maternelle représente pendant longtemps l’évidence, celle que l’on a trouvée sans jamais la chercher, la seule option possible qu’on ne tente même pas d’expliquer. Mais ouvrir son horizon à une seconde langue remet les choses en perspective.
Une langue supplémentaire permet indiscutablement d’approfondir la connaissance de sa propre langue
La structure linguistique que telle ou telle langue a choisie prend du relief lorsqu’elle se trouve comparée à d’autres : la genèse des mots se révèle, les fonctions dans la phrase s’organisent, la signification des mots se précise. Si ombre se traduit en anglais par shadow et shade, c’est bien que le terme français recouvre deux notions totalement distinctes. Même l’accord du participe passé avec le verbe avoir peut se mesurer à l’aune de l’ergatif en hindi.
Et vous, quelles sont vos raisons ?